vendredi 20 décembre 2013

Schefferville : le dernier train?

Cet essai a été rédigé par Katharina Jechsmayr et moi dans le cadre du cours URB 1116 Urbanisation et mondialisation. Il tente d'expliquer en moins de 3500 mots les conditions et paramètres qui ont déterminé l'urbanisation de la région férrifère de Schefferville.

Introduction


La côte nord du golfe du Saint-Laurent a été, depuis les tous premiers contacts des européens, une région-ressource. Pêcheries, traite de la fourrure, exploitation forestières, minières et aménagements hydro-électriques s’y sont succédés, entraînant la création de petites localités, d’abord sur la côte, puis plus en retrait, à proximité des réserves exploitées. Située dans cette région, au centre de la péninsule du Labrador et aux limites du Québec et de Terre-Neuve-et-Labrador, sur les contreforts des hauts plateaux du Bouclier Canadien, l’agglomération urbaine de Schefferville est née de l’exploration et exploitation du minerai de fer, abondant dans cette formation rocheuse. La région est aujourd’hui divisée en quatre entités administratives couvrant un peu moins de 60 km² : Schefferville, ville allochtone de régime municipal, Kawawachikamach, village naskapi né d’un traité entre la nation naskapie et le gouvernement du Québec, ainsi que les réserves de Matimekosh et Lac-John, communautés de la nation innue adminstrées en vertu de la Loi sur les Indiens. D’abord une affaire de «Blancs», ces deux peuples autochtones sont aujourd’hui partie prenante du développement de la région.

L’objectif de ce travail sera de montrer la dépendance de cette agglomération à la mono-industrie de l’exploitation du minerai du fer et l’inévitable impasse de cette activité unique sur un développement urbain perdurant à travers le temps.

Nous décrirons les quatre périodes qui ont marqué la ville de Schefferville. D’abord, nous survolerons la très longue période précédant la fondation de la ville en 1955. Nous décrirons ensuite la période d’expansion qui a suivi l’ouverture de la mine jusqu’à sa fermeture en 1982. Nous traiterons ensuite du déclin de la ville allochtone et sa reprise par les autochtones. Nous terminerons en brossant le portrait du retour de l’exploitation minière.


Période pré-industrielle


Dans la deuxième moitié du XIXe siècle, le père Louis Babel note la présence de minerai dans le Nord québécois, aux environs de l’actuelle Schefferville. Les voyages d’explorations de 1892 à 1895 du géologue Albert P. Low confirment la présence de fer dans l’arrière-pays de la Côte-Nord. C’est la Labrador Mining and Exploration Co. (LME) qui, grâce à l’acquisition d’une concession minière, pourra poursuivre les travaux d’exploration dès 1936. Après la Seconde Guerre Mondiale, les réserves de fer sont épuisées aux États-Unis et les sidérurgies doivent dorénavant se tourner vers les gisements inexploités et reculés du Nord canadien. La LME fusionnera avec six autres aciéries pour former l’Iron Ore Company of Canada (IOC).

En 1950, l’IOC, par le biais de sa filiale de transport ferroviaire Quebec North Shore and Labrador Railway (QNS&L), lance le projet de construire un chemin de fer d’une longueur d’environ 600 kilomètres à partir de Sept-Îles pour y acheminer du minerai en provenance d’un site d’extraction sur la faîte de la ligne de partage des eaux entre la baie d’Ungava et la mer du Labrador. Ces travaux marquent le premier pas vers l’existence d’une ville sur les hauts plateaux de l’Ungava.

Constituant la «“company town” par excellence», l’existence de Schefferville est fortement dépendante de la compagnie minière. La reconnaissance implicite de la frontière Québec-Labrador, définie par le Privy Council de Londres en 1927, et les changements à la réglementation sur les concession minières en 1951 accéléreront l’implantation d’un territoire municipalisé. Suivant un modèle éprouvé dans les villes minières de Chibougamau et Murdochville, le gouvernement du Québec, par le biais de son ministère des Affaires municipales, met en vente des propriétés et finance la construction des infrastructures en investissant les profits fonciers dans un fond qui financera l’ouverture de rues, l’érection d’édifices municipaux et l’achat d’équipements. C’est la compagnie qui a planifié l’aménagement de la ville, étant propriétaire de pratiquement tout l’établissement humain de la région. En fait, la présence et l’activité de la compagnie permettait l’existence, la stabilité ainsi que la rentabilité de la ville, puisqu’elle était de toutes les sphères : économique, foncière, sociale ― et même «familiale». La compagnie minière prendra peu à peu ses distances de l’administration municipale vers la fin des années 1960 pour s’en retirer complètement en 1973, lorsque la taxe spéciale que devait payer la compagnie sera abolie, mettant fin au renflouement systématique des caisses déficitaires de la ville.


Une occupation non-urbanisante


Occupant les régions du contact toundra-taïga de la péninsule du Labrador depuis des temps immémoriaux, le peuple Naskapi était autosuffisant, subsistant grâce à la chasse, la cueillette et le piégeage. Ces nomades ont démontré, pour la plupart, peu d’intérêt envers traite des fourrures avec la Compagnie de la Baie d’Hudson puisqu’ils jugent les prix offerts et la qualité de la marchandise par la Compagnie trop faibles. Les multiples tentatives d’installation de postes en territoire naskapi échoueront. Après plusieurs déménagements de leur établissement entre Schefferville et Fort Chimo (Kuujjuaq), les Naskapis s’installent en 1956 sur le bord du lac John, où ils rejoignent les Innus qui s’y trouvent déjà.

Fréquentant régulièrement «le pays de la terre sans arbres» depuis quelques dizaines de siècles pour s’y adonner à la chasse au caribou, des Innus de la bande de Maliotenam, près de Sept-Îles, s’étaient établis sur les rives du lac Knob en 1956. Déplacés quelques mois plus tard lors de la construction de l’aéroport, ils s’implanteront à deux kilomètres plus loin, au nord-est, sur les rives du lac John. L’administration municipale de Schefferville exerce des pressions auprès du gouvernement fédéral et du conseil de bande afin de relocaliser les terres réservées dans l’enceinte urbanisée; la communauté de Matimekosh est ainsi créée au terme de «longues et pénibles négociations», et une partie des résidents de Lac-John vont s’y établir. En 1983, suite à la signature de la Convention du Nord-Est québécois, la communauté Naskapi logera sur des terres lui étant réservées à 7 kilomètres au nord-est de la ville.


Villes jumelles


Le destin de Schefferville est garant de celui de Sept-Îles, d’où est transformé expédié le minerai. Autrefois petit havre de pêche et poste de traite, la ville côtière connaîtra un essor sans précédent grâce à l’exploitation minière de l’arrière-pays. Sa population croît de façon exponentielle, passant 2000 à 14 000 habitants entre 1951 et 1961, alors que les installations de transformation et de manutention du fer attireront ouvriers temporaires et permanents. Les nouveaux sites d’extraction de fer à Wabush et Labrador City, au Labrador, déverseront dès 1961 la matière première à Sept-Îles grâce à une antenne ferroviaire à partir du chemin de Schefferville. L’ouverture de ces mines favorisera la croissance de la métropole régionale dont la population culminera à 31 000 en 1981, avant de péricliter, atteignant 28 487 en 2011.


Ville mono-industrielle


En dépit des grands défis techniques (rudesse du climat, distance géographique incommensurable) et aussi économiques en découlant. La présence de nombreux plans d’eau et de milieux humides rend toute construction difficile; le site choisi pour l’établissement d’une ville sera une isthme entre les lacs Pierce et Knob, recouverte d’une fine couche de gravier permettant l’érection de bâtiments. En 1953, l’IOC commence son exploitation là où deux ans plus tard la ville sera fondée. Le premier ministre du Québec Maurice Duplessis annonce en mai 1953 qu’une nouvelle ville sera créée dans l’Ungava nécessitant des investissements de 68 millions $. Le 1er août 1955, la municipalité de ville de Schefferville est incorporée et une mairie élue prend le relais de l’Iron Ore dans la fourniture de services municipaux.,

En 1959, 67% de la population active de la ville travaille dans le secteur de l’extraction des ressources naturelles, et 100% de ces travailleurs sont à l’emploi de l’Iron Ore of Canada. À Matimekosh, 125 des 500 résidents sont à l’emploi de la minère. Les conditions de travail sont assez rudes en raison du climat peu clément envers le travail extérieur, et le froid subarctique force au chômage les mineurs lorsque l’air ambiant suffit à lui seul à geler le minerai dans la machinerie et les wagons.

Le secteur de la construction, le deuxième plus important en terme d’emploi, occupe 13% de la population active, alors que la ville pousse comme un champignon, nécessitant logements et équipements pour la desserte de sa population.

Source : Beauséjour, 1959.

Schefferville à ses débuts attire de un nombre impressionnant de jeunes hommes venus y travailler : en 1959, les 35 ans et moins représentent plus de 75% de la population, et le ratio homme-femme, toutes classes d’âge confondues, est de près de 3:1. Ce ratio particulièrement élevé n’empêche pas un taux de naissance de 31,78 ‰ pour l’année 1958. La population de Schefferville s’est accrue de 179,5% entre sa deuxième et sa quatrième année d’existence en tant qu’entité municipale, passant de 1632 à 4562. L’immigration interrégionale est responsable de la majeure partie de cette croissance.

En 1959, l’offre de logements ne suffit pas à la demande et l’Iron Ore doit ériger des campements temporaires de roulottes pour y héberger la masse de travailleurs qui afflue. À cette date, on trouve 83 propriétaires de logement, alors que le nombre de locataires est 10 fois plus élevé. C’est la compagnie minière qui est le plus grand propriétaire foncier et locateur de la ville.

On observe un déclin de la population dans les années 60, alors que la quantité de minerai extraite est en baisse constante depuis 1959 et que la construction est fortement ralentie.

Sources : Beauséjour, 1959; Barbeau, 1987; Statistique Canada, 2012 et CHASS, 2013

Une existence redevable à la finance américaine


Sauf pour Sidbec-Normines, société d’État, l’exploitation du fer nord-côtier est dépendante en presque totalité des capitaux américains de cinq grandes banques étasuniennes, avec à leur tête les groupes Rockefeller et Mellon et, dans une moindre mesure, les groupes Chemical Bank, Cleveland Trust et J.P. Morgan. Il n’est pas étonnant, donc que la majorité du fer extrait dans la région soit destiné aux aciéries des États-Unis (52 %), et secondairement à la Communauté Économique Européenne (29 %) et vers le Japon (7,8 %). Le destin de Schefferville, du compte de taxe municipal de ses citoyens à l’approvisionnement en nourriture de ses résidents, est donc à la merci de la santé de l’économie globale et directement tributaire des prix de l’acier sur les marchés américains.


Choc pétrolier


Or, l’Iron Ore connaît de sérieuses difficultés alors que les entreprises sidérurgiques américaines réduisent leur production ― et donc leur demande en fer ― dans le milieu de la décennie 1970. La concurrence du minerai brésilien, australien et libérien menacent également les débouchés vers l’Europe et le Japon. La crise économique qui a suivi le choc pétrolier, ainsi que le perfectionnement de la récupération de la ferraille et des techniques de transformation du fer (moins gourmandes en matière première) ont entraîné un plafonnement de la demande en acier et en minerai brut.

La production de fer de l’IOC, déjà en baisse depuis 1959, n’est plus concurrentielle sur le plan mondial ― même en l’IOC elle-même, qui détient des parts dans des mines brésiliennes, notamment. Les procédés de bouletage et de concentration de l’usine de Sept-Îles ne répondent plus aux normes internationales et nécessitent d’importants investissements. Ces installations seront fermées en 1980. L’augmentation des tarifs d’électricité, tant au Québec et au Labrador, a, de toute façon, rendu plus chère la transformation du minerai. Le fer nord-côtier est désavantagé à cause de l’augmentation des coûts de production de la dernière décennie. L’augmentation des coûts du mazout a rendu moins avantageux le transport ferroviaire et l’accélération de l’augmentation des tarifs de la voie maritime du Saint-Laurent à partir de 1977 ont accru les coûts de transport. La double taxation Québec-Labrador ― la mine est située de part et d’autre de la frontière ―, la cotisation à la Commission de Santé et Sécurité au Travail jugée trop élevée, les salaires élevés et bénéfices marginaux nombreux et les exigences environnementales du gouvernement du Québec auront raison de l’exploitation ferrifère à Schefferville.


Le 2 novembre 1982, Brian Mulroney, alors président de l’IOC, annonce la fermeture définitive de la mine.

Fermeture de la mine

Source : CHASS, 2013

L’année avant la fermeture de la mine, l’agglomération de Schefferville compte 2754 habitants, incluant les 757 habitants des communautés de Matimekosh et Lac-John. En 1976, année où la mine était encore en pleine activité, l’agglomération de Schefferville comptait 4232 habitants. La croissance avait donc déjà commencé lors de la fermeture; 35 % de la population avait déjà quitté la ville dans les 5 années précédentes. Les Scheffervillois était assez peu mobiles pour une ville mono-industrielle : 16,5% de la population était installée à demeure depuis moins de 5 ans. La ville ayant un solde migratoire négatif, le déclin de la population se poursuivra jusqu’en 1990, alors que le gouvernement annule la fermeture de la ville qu’il avait annoncée quelques mois auparavant.

La structure de la population par âge révèle une concentration de la population âgée 30 et 50 ans. À la vieille de la fermeture, le ratio hommes-femmes est plus équilibré qu’aux débuts de la ville. On note cependant une surreprésentation masculine pour la tranche d’âge de 30 à 40.

Les différences entre les conditions de logement de la population des réserves la population municipale sont énormes. Les données nombre de personnes par ménage en 1981 montrent de grands écarts. Un ménage scheffervillois compte en moyenne 2,89 personnes, tandis qu’un ménage de Matimekosh compte en moyenne 6,77 personnes. 25 ménages de cette communauté comptent 10 personnes et plus, alors que dans la partie allochtone de Schefferville, aucun ménage ne compte autant de personnes. Les ménages du territoire innu-naskapi ne comptant qu’une personne sont au nombre de 5, alors qu’en territoire allochtone, on compte 170 ménages.

Le revenu est un autre indicateur des grandes disparités entre les résidents des secteurs municipalisé et réservé. Ainsi, lorsque l’on franchit les limites des communautés autochtones, le revenu médian passe presque du simple au triple à la faveur des allochtones, laissant supposer que la richesse créée par l’exploitation minière n’est pas répartie équitablement en fonction de l’appartenance ethnique.

En 1981, 10,5 % de la population se trouve en chômage, alors que ce taux est de 7,6 % ailleurs au Canada. Le marché de l’emploi s’est quelque peu diversifié depuis 1959, alors que 48 % des travailleurs de la région sont maintenant occupés par le secteur des industries primaires. Le secteur de la construction n’occupe plus que 6 % des travailleurs, tandis que les services socio-culturels, commerciaux et personnels occupent plus de 25 % de la population active.

La mise à pied des 285 derniers travailleurs de l’Iron Ore en 1982 a entraîné un exode massif : plus de 75 % des logements sont abandonnés ― ou même transportés, dans certains cas, alors qu’un quartier entier de maisons mobiles dans l’est de la ville est disparu. Le nombre de commerce, déjà en baisse depuis un certain moment, chute de 48 à 29 et le centre de santé réduit sa capacité de 75% dans les 2 ans suivant la fermeture. Cet exode accélère le déclin démographique déjà enregistré depuis 1976; 85 % de la population allochtone restante quittera entre 1981 et 1984. La population autochtone devient fortement majoritaire, mais demeure confiné sur des territoires exigus dans des logements surpeuplés. Cette crise est amplifiée par le fort accroissement naturel des populations innue et naskapie et le refus de l’Iron Ore de transférer la propriété des logements abandonnés au Conseil de bande.

En 1990, la démolition des bâtiments est arrêtée par l’Iron Ore et le gouvernement du Québec. La province s’occupera dorénavant de l’équilibre budgétaire et permettra aux allochtones de demeurer dans le centre de la ville pendant que les autres quartiers sont réservés aux autochtones à qui on octroie le droit de garder quelques maisons.

Les terres de réserve de Matimekosh seront agrandies en 1998 via le transfert par le gouvernement du Canada pour l’usufruit des innus d’une partie importante des quartiers abandonnés de Schefferville, faisant passer quadrupler la superficie de la communauté, qui passera de 15 à 67 hectares ― en plus de réinvestir les terres en rive du Lac-John pour y construire du logement et apaiser la crise à Matimekosh. Les Naskapis bénéficiaient déjà d’un territoire de 326 km² depuis la signature d’un traité avec le gouvernement du Québec à la fin des années 70.

90 % des résidents de l’agglomération de Schefferville déclaraient en 2011 avoir une identité autochtone.


Ré-ouverture?


«À cause de l'appétit vorace des pays émergents, Chine et Inde en tête,» et du cadre favorable à la prospection et à l’extraction engendré par le Plan Nord du gouvernement provincial ― séries de mesures et d’investissements pour faciliter l’exploitation des ressources naturelles au nord du 52e parallèle ―, les activités d’exploitation minière ont repris leur cours à l’automne 2012. New Millenium Iron et son partenaire indien Tata Steel Miners Canada Limited ont expédié le premier chargement de minerai brut à destination de l’Europe le 14 septembre 2013. Utilisant une bonne partie des installations minières existantes, les projets DSO (Direct Shipping Ore, expédition du minerai brut) et Taconite visent l’exploitation permanente des gisements de fer de Schefferville à très court terme. Les mineurs allochtones et naskapis se côtoieront dorénavant sur la mine : en 2011, New Millenium envisageait d’employer 250 à 300 autochtones (le tiers des employés) en offrant localement la formation aux futurs travailleurs. Avec un taux de chômage d’environ 23 % en 2011, le nombre de travailleurs disponibles sur place est assez élevé. Par ailleurs, la nation naskapie a investi dans le capital de départ de New Millenium à hauteur de 20%, recevant une option supplémentaire de redevances. Aussi, en partenariat avec les innus de Uashat mak Mani-Utenam et Matimekosh-Lac John, la nation de Kawawachikamach a fondé la société Transport Ferroviaire Tshiuetin, exploitant une partie du tronçon ferroviaire permettant d’acheminer passagers et minerai vers Sept-Îles, où il ne peut pas être traité sur place, mais d’où il est directement envoyé vers les marchés d’Europe et d’Asie. Mentionnons également une prise en charge locale d’autres activités économiques par les Naskapis; Lynx Mobility, par exemple, offre maintenant des services de téléphonie sans-fil à la région scheffervilloise ― et dans bon nombre de communautés autochtones du Nunavik et du Nunavut. L’implication économique des acteurs locaux (et particulièrement des populations autochtones) est une expérience inédite pour la ville nordique, dont la survie économique se trouvait autrefois sous la tutelle des banques américaines.

Cette implication de l'administration locale se traduit également sur le plan du logement, dont la majorité est administrée par les Conseils de bande locaux. En effet, 76 % des logements de l’agglomération sont des logements de bande, alors que 17 % sont loués par des particuliers et 7 % sont en régime de propriété foncière. La région comptait en 2011 560 logements privés pour 440 ménages. La crise de logement s’est nettement résorbée dans les 30 années suivant la fermeture de la mine, alors que moins de 5% des ménages doivent loger plus d’une personne par pièce.

Sources : Beauséjour, 1959; Barbeau, 1987; Statistique Canada, 2012 et CHASS, 2013
Au recensement, en 2011, la population de l’agglomération comptait 1385 habitants, en constante augmentation depuis 1986, année où l’on a compté le moins d’habitants dans l’agglomération depuis l’ouverture de la mine. Le taux de croissance de la population, bien que près de zéro, est repassé du côté positif, vers 1990, alors que la fermeture de la ville et la démolition des logements ont été stoppées. La structure par âge révèle une population beaucoup plus jeune que celle de 1981 : les moins de 25 ans forment maintenant 47% des effectifs, laissant supposer une natalité très importante. La décroissance de la ville à partir de 1976  a laissé des cicatrices générationnelles visibles, alors que les 30 à 39 ans sont nettement moins représentés dans la pyramide, particulièrement du côté des hommes.

Source : Statistique Canada, 2011

Conclusion


L’existence d’un établissement humain dans la région de Schefferville a été, tout au long de son histoire, soumise aux impératifs économiques dictés par une force extérieure à la production locale, que ce soient les barèmes de prix des fourrures de la Compagnie de la Baie d’Hudson ou l'engouement pour le fer des sidérurgies américaines, japonaises ou indiennes. La population de Schefferville, ville constituée en terre hostile au peuplement humain permanent, a fortement variée au cours de son histoire, en proche corrélation avec la capacité de production de son industrie unique : le minerai de fer. La matière première, présente en abondance dans la fosse du Labrador, attire encore en 2013 un nombre inégalé par le passé de prospecteurs miniers. Cette exploration aux paramètres similaires à ceux de la décennie 1950 laisse présager une répétition de l’histoire, avec une temporalité similaire, seulement des acteurs différents. Le Dernier train de Michel Rivard deviendra-t-il Mashten ishkuteutapan une fois que New Milleniun et Tata Steel se seront retirés de la région?

Références bibliographiques :

  • BEAUSÉJOUR, G. [enquêteur]. Inventaire économique et industriel, municipalité Schefferville, comté de Saguenay, Ministère de l'industrie et du commerce, Commissariat industriel, 1959, Québec.
  • BARBEAU, Michel T. Schefferville : relations inter-ethniques et dynamique du développement en milieu nordique, mémoire présenté à l'Université du Québec à Chicoutimi comme exigence de la maîtrise en études régionales, Université du Québec, 1987, Sainte-Foy.
  • BRADBURY, J. et WOLFE, J.M. [dir.]. «Recession, Planning and Socio-Economic Change in the Quebec-Labrador Iron-Mining Region» dans McGill Subarctic Research Paper, n° 38, Centre for Northern Studies and Research McGill University, 1983, Montréal.
  • CHASS Data Centre, University of Toronto. Canadian Census Analyser, mise à jour du 20 novembre 2013, http://dc.chass.utoronto.ca/census/ [en ligne]
  • COMMISSION DE TOPONYMIE. Banque de nom de lieux du Québec, mise à jour novembre 2013, http://www.toponymie.gouv.qc.ca/ [en ligne]
  • DURAND, Monique. Schefferville: une seconde vie, Le Devoir, mise à jour du 2 juillet 2011, http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/326619/carnets-du-nord-schefferville-une-seconde-vie [en ligne]
  • DURAND, Monique. Un autre possible pour Kawawachikamach, Le Devoir, mise à jour du 9 juillet 2011, http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/327108/carnets-du-nord-3-un-autre-possible-pour-kawawachikamach [en ligne]
  • FRENETTE, Pierre. Histoire de la Côte-Nord, Presses de l'Université de Laval, 1996, Sainte-Foy.
  • GUAY, Jean-Herman [dir.]. Annonce de l’établissement de deux villes minières, page consultée le 21 novembre 2013, http://www.bilan.usherb.ca/bilan/pages/evenements/1084.html [en ligne]
  • SIMARD, Janick [coord.]. Amérindiens et Inuits, portait des nations autochtones du Québec, 2e édition, Publications du Québec, 2011, Québec.
  • JOURNAUX, André et TAILLEFER, François. « Les mines de fer de Schefferville » in Cahiers de géographie du Québec, vol. 2, n° 3, 1957, p. 37-61.
  • LYNX MOBILITY. Lynx Mobility, page consultée le 20 décembre 2013, http://www.lynxmobility.com/ [en ligne]
  • NEW MILLENIUM IRON. Projet DSO - Contexte, mise à jour en 2013, http://www.nmliron.com/projets/projet-dso/contexte [en ligne]
  • PARÉ, Pierre. La toponymie des Naskapis, Publications du Québec, 1990, Québec.
  • PERREAULT, Pierre. Le pays de la terre sans arbre ou le Mouchouânipi, Office National du Film, 1980, 110 min. 6 s. [VHS]
  • RIVARD, Michel. «Schefferville, le dernier train», Sauvage, Les éditions Bonne Délivrance, 1983, 5 m. 30 s. [33 tours]
  • ROBERGE, Denis. Tout le monde en parlait, saison 8, épisode 2, Radio-Canada, 2013, 21 min. 36 s., http://www.tou.tv/tout-le-monde-en-parlait/S08E02 [en ligne]
  • STATISTIQUE CANADA. Profil du recensement (2011), diffusé le 24 octobre 2012, http://www12.statcan.gc.ca/census-recensement/2011/dp-pd/prof/index.cfm [en ligne]
  • STATISTIQUE CANADA. Enquête nationale auprès des ménages (ENM), diffusé le 11 sept. 2013, http://www12.statcan.gc.ca/nhs-enm/index-fra.cfm [en ligne]
  • SYSTÈME D’ARPENTAGE DES TERRES DU CANADA, Gouvernement du Canada. Historique foncier : Matimekosh, consulté le 25 novembre 2013, http://www.rncan.gc.ca/sites/www.nrcan.gc.ca/files/earthsciences/pdf/land-surveys/MATIMEKOSH_FR.pdf [en ligne]
  • VALLIÈRES, Marc. Des mines et des hommes: histoire de l'industrie minérale québécoise; des origines à aujourd’hui, Publications du Québec, 2012, Québec.
  • VALLIÈRES, Marc. Des mines et des hommes: histoire de l'industrie minérale québécoise; des origines au début des années 1980, Publications du Québec, 1989, Québec.

vendredi 17 mai 2013

Quelques mises à jour

Beaucoup d'encre a coulé sous les ponts depuis 3 ans. En guise d'entrée en matière en vue de nouvelles entrées à ce blogue, ainsi qu'en guise d'excuses pour mon mutisme prolongé, voici un suivi des sujets abordés lors des entrées précédentes.  

Géoblogging 

Plusieurs techniques permettent désormais de localiser géographiquement l'utilisateur d'un réseau social. Les exploitants de ceux-ci ont mis à profit les procédés multiples de localisation par adresse IP, localisation par ondes cellulaires et localisation par satellite (le bon vieux GPS) ― trois technologies autrefois coûteuses et encombrantes aujourd'hui toutes intégrées à la quasi-totalité des dispositifs «mobiles» ; les téléphones dits intelligents ― afin de mieux s'emplir les poches en vendant de la publicité géociblée. Des plateformes sociales, telle Foursquare, en font désormais leur pain et leur beurre.

Twitter et Facebook offrent désormais d'associer un emplacement à chaque publication, tel que je le suggérais en 2009, à une époque où le terme «réseau social» était assez peu répandu au point où l'on devait inventer des mots pour en parler.

Un pont Champlain en vaut bien un autre

Le département des transports de l'État de New York inaugurait le 7 novembre 2011 le nouveau pont Champlain (en remplacement de celui qui avait explosé, j'en avais parlé dans un billet), celui au sud du 45e parallèle, dont le design et la construction ont été complétés en moins de 2 ans. Il s'agit d'un pont à arche à réseau de suspension entrecroisé (traduction libre de «network arch bridge», je ne suis pas très calé en terminologie de l'ingénierie civil anglo-saxonne).

Beau ti-gars de pont
Pendant/depuis ce temps, alors qu'on remet en doute jour après jour sa solidité, sa fiabilité et sa capacité à supporter 165 000 véhicules par jour, on est encore à se demander de quelle couleur le remplacement de l'actuel pont Champlain, celui de Montréal, sera peinturé. J'exagère à peine.

Denis Coderre va tout nous arranger cela, évidemment.

Un transport de plus en plus commun

En 2010 était lancé le Transport collectif de la Jacques-Cartier (TCJC), un service qui s'approchait davantage de la navette entre la banlieue nord de Québec et son centre que du transport en commun. Les 5 circuits offerts par minibus et autobus scolaire modifié en 2010 se sont démultipliés : 12 circuits sont maintenant offerts aux résidents de la couronne nord de la Capitale nationale vers la Colline parlementaire et Sainte-Foy, à bord de véhicules plus adaptés au transport d'adultes que les précédents.

Voici une liste non-exhaustive de quelques ajouts :
  • La municipalité de Saint-Gabriel-de-Valcartier, reconnue pour son centre de villégiature, est désormais desservie;
  • Le wi-fi est offert gratuitement à bord des véhicules;
  • Depuis le 1er juin 2011, un laisser-passer avec intégration tarifaire métropolitaine est maintenant offert. Cela signifie qu'avec un seul et même titre de transport, un usager du TCJC peut bénéficier de tous les services de transport en commun de la région métropolitaine de la Capitale nationale, soit : le Réseau de transport de la Capitale (RTC), le traversier Québec-Lévis (STQ), la société de transport de Lévis (STL) et PLUMobile (desservant les municipalités à l'est de Québec), en plus de ceux du TCJC.
Comme quoi, même dans la Cité du Pickup et de honk-a-cyclist, le transport en commun fait son chemin.

Bien des 0 et des 1 ont coulé sur les interwebs depuis ma dernière intervention ; j'ai donc plein de choses à raconter.

Au plaisir de vous écrire.